Rivarol n°3521 du 1/6/2022
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Rivarol n°3522 du 8/6/2022 (Papier)

Editorial

Législatives : vers une abstention record ?

LES ELECTIONS législatives des 12 et 19 juin pourraient être marquées par un nouveau record d’abstention du fait de la démobilisation et du désintérêt du corps électoral pour ce scrutin. Les scores vertigineux déjà observés en 2017 (51,30 % d’abstention au premier tour, 57,36 % au second tour) pourraient être encore plus impressionnants cette fois-ci. Il faut dire que tout concourt actuellement à ce que les Français en âge de voter et jouissant de leurs droits civiques désertent l’isoloir. On observe d’abord une certaine lassitude. Les législatives qui suivent de quelques semaines l’élection présidentielle, elle-même organisée sur deux tours, sont traditionnellement marquées par une participation assez médiocre, sinon faible. Les électeurs ont tendance à considérer que tout se joue lors de la présidentielle qui est en effet depuis la réforme constitutionnelle de 1962 l’élection-reine de la Vème République et, assez logiquement, ils se désintéressent par conséquent des législatives subséquentes. L’instauration du quinquennat en 2000 a considérablement aggravé cette évolution en faisant du président un futur Premier ministre et en ne dissociant plus les durées du mandat du chef de l’Etat, réduit à cinq ans au lieu de sept auparavant, de celui des députés, également de cinq années. Au-delà de ces deux facteurs, il faut reconnaître que tout est fait pour entraîner une dépolitisation du peuple. Il est loin le temps où l’on se battait pour un idéal, des principes, une doctrine, une vision de l’homme et de la société. Il s’agit aujourd’hui d’être les gestionnaires du déclin, de la décadence, les garants et gardiens du politiquement correct, de la police de la pensée. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que les campagnes électorales, et surtout celles dans les 577 circonscriptions de la métropole et de l’outre-mer, ne passionnent pas les foules.
Cela dit, il n’est même pas sûr que des campagnes dynamiques, avec des propositions très marquées et des propos vigoureux seraient de nature à réveiller un peuple amorphe, passif, résigné, drogué de jeux télévisés, d’écrans et de divertissements variés. Malgré l’aggravation de la situation dans tous les domaines, il n’est pas évident que même un discours relativement décomplexé et clair comme celui du Front national dans les années 1980 et 1990 rencontrerait aujourd’hui un franc succès auprès des masses tant l’heure est aujourd’hui à la modération, à la fadeur, à la résignation, à la recherche à tout prix de la tranquillité personnelle et immédiate, et répugne à la radicalité, à la transgression du politiquement correct. Et ce n’est certes pas là une bonne nouvelle, car cela signifie une perte d’énergie, de capacité à résister, à se mobiliser, à refuser, à rejeter ce qui nous conduit à la mort et à la destruction. Il n’est rien de pire qu’une marche mente et insidieuse vers la tombe, vers le précipice. Et pourtant c’est bien ce que nous vivons aujourd’hui. De fait, dans sa grande majorité, il n’y a plus, semble-t-il, aujourd’hui de résistance active et résolue à la submersion de notre pays, à la destruction de la morale traditionnelle et de nos traditions les plus fondamentales, aux avancées chaque jour plus effrayantes du lobby LGBT, à la négation chaque jour plus totale de nos libertés, comme en témoigne entre autres la perte par RIVAROL de l’agrément de la commission paritaire. La CPPAP est incapable de démontrer en quoi nous ne sommes pas ou nous ne sommes plus un journal d’information politique et générale, on nous fait seulement grief de ce qui s’apparente à un délit d’opinion.  Bien que nous traitions chaque semaine de l’actualité, comme on peut le constater objectivement, le fait que nous ne soyons pas adepte du politiquement correct, le fait que nous osions aborder différents sujets aujourd’hui tabous, ce qui est, il est vrai, une exception dans la presse écrite en France, entraîne une persécution désormais ouverte, administrative, judiciaire, politique. C’est la preuve finalement que nous disons la vérité, que nous menons le bon combat. Car si ce que nous disions ne gênait pas les puissants, pourquoi fomenteraient-ils notre perte, pourquoi s’acharneraient-ils à ce point alors que nous sommes si petits, si modestes, si minuscules par rapport au media obèse disposant de sommes considérables, de mécènes, d’appuis, de fonds publics ou privés ?

LES SONDEURS et gazettes s’interrogent ces jours-ci pour savoir si Macron et ses alliés disposeront de la majorité absolue à l’Assemblée nationale. Ce qui semble être le cas si on en juge par les résultats déjà connus chez les Français de l’étranger, même si Macron obtient chez ces électeurs des scores toujours nettement supérieurs à la moyenne nationale. Soit dit en passant on se réjouira de la défaite dès le premier tour de l’ancien Premier ministre, le Likoudnik Manuel Valls, persécuteur de Dieudonné et de la libre parole. Mais au fond cette question de la majorité parlementaire n’a guère d’importance car, que le président réélu dispose ou non d’une majorité absolue, cela ne l’empêchera nullement de mener à bien son entreprise de destruction du pays. Une simple majorité relative lui suffirait amplement pour gouverner pendant tout le quinquennat. Souvenons-nous des législatives de juin 1988. Le président socialiste François Mitterrand, brillamment réélu face à Jacques Chirac le 8 mai 1988 avec plus de 54 % des suffrages exprimés, avait dissous l’Assemblée mais, contrairement à juin 1981, le Parti socialiste n’avait pas alors obtenu la majorité absolue, mais seulement la majorité relative. Est-ce que cela a empêché le président de conduire la politique qu’il souhaitait ? Nullement. Il a nommé successivement trois Premiers ministres socialistes, Michel Rocard (1988-1991), Edith Cresson (1991-1992) puis Pierre Bérégovoy (1992-1993) et tous les textes qu’il a voulu faire adopter, y compris les plus détestables, comme la loi Gayssot en 1990 ou la loi Neiertz en 1993 créant un ahurissant délit d’entrave à l’IVG, l’ont été sans grande difficulté. Pour faire voter ces projets de loi, le gouvernement s’appuyait en effet tantôt sur les centristes, tantôt sur les communistes, et c’est ainsi que la législature est allée à son terme. Aucune motion de censure n’a obtenu la majorité absolue, les différents gouvernements socialistes entre 1988 et 1993 n’ont jamais été renversés. De la même manière, il y a fort à parier que si Macron n’obtenait pas la majorité absolue (ce qui n’est pas l’hypothèse la plus probable, ses électeurs, majoritairement âgés et aisés, ne désertant jamais les urnes, contrairement aux jeunes et aux catégories populaires qui lui sont beaucoup moins favorables), il pourrait s’appuyer tantôt sur la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (NUPES) de Mélenchon, ou sur certains de ses éléments les plus modérés, tantôt sur les Républicains pour obtenir, au cas par cas, une majorité d’idée sur tel ou tel texte de loi. Par exemple la Macronie pourrait compter sur les voix de la NUPES pour légaliser l’euthanasie, le suicide assisté, la GPA et faciliter le changement de sexe. Ou encore pour aller plus loin dans les folies écologistes et antispécistes. A l’inverse, elle pourrait parfois avoir besoin des voix des députés LR pour la réforme des retraites et de la Sécurité sociale, pour le refus de l’augmentation des bas salaires et des minima sociaux.
Ajoutons que le scrutin majoritaire à deux tours favorise mécaniquement et fortement le président élu ou réélu. Lequel, sauf en 1988, a toujours obtenu une majorité absolue. C’est pourquoi Macron s’est refusé lors de son premier mandat à réintroduire la proportionnelle, fût-ce de manière restrictive, pour les législatives, et ce contrairement à ce qu’il avait dit lors de la campagne présidentielle de 2017. Il n’avait en effet aucun intérêt à modifier le mode de scrutin, dès lors qu’il était convaincu d’être réélu face à Marine Le Pen qu’il voulait une nouvelle fois comme adversaire au second tour, assurance de sa confortable et certaine réélection.

COMBIEN DE PARLEMENTAIRES obtiendront le Rassemblement National, Reconquête, Debout la France et les Patriotes au soir du 19 juin  ? Probablement aucun, à part peut-être Nicolas Dupont-Aignan dans l’Essonne, pour les trois derniers cités et sans doute une poignée pour le premier, le scrutin majoritaire à deux tours agissant comme un laminoir, surtout pour les mouvements disposant de peu de sortants et d’élus locaux implantés et connus. Le déficit de notoriété et d’implantation est dévastateur dans des élections législatives qui reposent sur un système par circonscription au scrutin majoritaire à deux tours. En une quarantaine d’années, depuis son émergence à Dreux en 1983, le Front national, rebaptisé en 2018 Rassemblement national, n’a jamais réussi, sauf dans quelques rares exceptions qui, comme en grammaire, confirment la règle, à percer le plafond de verre du scrutin à deux tours. Il est douteux qu’il y arrive beaucoup plus fortement cette fois-ci malgré la politique de dédiabolisation et de normalisation de Marine Le Pen.
De toute façon, les huit députés FN et apparentés élus en 2017 ont brillé par leur absentéisme, se sont montrés le plus souvent incapables de s’opposer aux projets de loi restreignant les libertés fondamentales ou détruisant l’institution familiale et les vertus traditionnelles. Sébastien Chenu, l’un des porte-parole de Marine Le Pen, après avoir été cofondateur de Gay-Lib, a ainsi déclaré que le RN était favorable aux droits des homosexuels, au “mariage” inverti, à la PMA pour les lesbiennes. Et Marine le Pen a avalisé les lois Pleven et Gayssot à maintes reprises, et encore pendant sa campagne présidentielle de 2022. Comme nous l’indiquait en privé un membre lucide et isolé du bureau politique du RN, l’un des très rares à ne pas nous être hostile, de toute façon, quel que soit aujourd’hui le gouvernement, qu’il soit LREM, LR, NUPES ou RN, il persécuterait vraisemblablement de la même manière RIVAROL, maintiendrait en tous points les législations liberticides et mortifères que nous subissons. C’est d’ailleurs cela qui est le plus tragique. Il n’est désormais plus aucune force d’importance significative qui se batte aujourd’hui pour la vérité et la liberté. A nous alors, à notre humble niveau, de nous battre avec foi, ardeur, courage et opiniâtreté, de rester sur le pont. Dans les joies comme dans les peines. Dans le calme comme dans les tempêtes. En ne déviant pas, avec la grâce de Dieu, du droit chemin.

RIVAROL, <jeromebourbon@yahoo.fr>. 

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Billet hebdomadaire

Quel avenir pour l’OTAN et l’UE ?

Nous avons vu ces dernières semaines que le conflit en Ukraine a été un formidable prétexte utilisé par les Etats-Unis pour renforcer et étendre l’OTAN, avec l’officialisation, par la Finlande et la Suède, de leur volonté d’intégrer l’alliance atlantique.
L’OTAN est la face militaire de l’Union européenne (cornaquée par l’Oncle Sam) qui se rigidifie actuellement, les deux constituant un vaste appareil de domination de l’Europe par les Etats-Unis qui ont fait du Vieux Continent leur glacis géopolitique.
Et si l’extension de l’OTAN et le tournant autoritaire de l’UE étaient leur chant du cygne ?

LA MORT CÉRÉBRALE DE L’OTAN

Lors d’un entretien accordé au journal britannique The Economist (le 7 novembre 2019), le président de la République, Emmanuel Macron, déclarait que l’OTAN était en état de mort cérébrale. Il a également averti les nations européennes qu’elles ne pouvaient plus compter sur les Etats-Unis pour défendre les alliés de l’OTAN, et il a ajouté que « l’Europe était au bord du précipice, et elle a besoin de commencer à penser par elle-même stratégiquement en tant que puissance géopolitique ; autrement nous n’aurons plus la maîtrise de notre destin. »
Le principal problème qui avait été mis en exergue à l’époque était le manque de coordination entre les Etats-Unis et l’Europe. Et Macron avait donné pour exemple le comportement unilatéral de la Turquie (qui est membre de l’organisation) en Syrie suite au retrait des troupes américaines. La Turquie maintient aujourd’hui cette politique de cavalier solitaire au sein de l’OTAN, jouant sur tous les tableaux et mangeant à tous les râteliers. Récemment, Erdogan s’est dit opposé à l’entrée de la Suède et de la Finlande dans l’OTAN ; il essaye ainsi de monnayer son accord dans le cadre de négociations qui sont certainement en cours avec les Etats-Unis.
Emmanuel Macron avait alors souligné que la décision américaine de retrait de la Syrie avait été prise sans aucune coordination.
Aussi, les journalistes de The Economist avaient posé une question importante à Macron, à savoir s’ « il croyait en l’effectivité de l’Article Cinq (du traité de l’OTAN), l’idée que, si un des membres de l’OTAN est attaqué, tous les autres doivent venir à son aide, ce qui, de l’avis de nombreux analystes, sous-tend l’effet dissuasif de l’alliance ». Ce à quoi il a répondu : « Je ne sais pas, mais que signifiera l’Article cinq demain ? ».
Demain, c’est-à-dire aujourd’hui, l’Article Cinq signifie une guerre directe contre la Russie qui pourrait nous conduire à un hiver nucléaire.
La Turquie était intervenue dans le nord syrien immédiatement après la déclaration de Donald Trump, le 7 octobre 2019, de retirer des troupes américaines de Syrie (comme il l’avait annoncé en décembre 2018) : « Les Kurdes se sont battus avec nous, mais ont reçu une somme énorme d’argent et d’équipement pour le faire. Ils combattent la Turquie depuis des décennies […]. Il est temps pour nous de sortir de ces guerres ridicules et sans fin, dont beaucoup sont tribales. »

RENFORCEMENT OU DISSOLUTION DE L’OTAN ?

Avant la guerre en Ukraine, certains spéculaient sur une éventuelle dissolution de l’OTAN. Mais il y a des forces puissantes qui veulent maintenir cette organisation, à commencer par l’Etat profond américain ; et l’Allemagne qui n’est plus une puissance militaire depuis longtemps, et qui se retrouverait par conséquent en position de faiblesse face à sa voisine, la France, qui a une armée et surtout un arsenal nucléaire.
Certes, l’Allemagne a des projets militaro-industriels avec la France : le fonds européen de défense, des financements pour lancer des projets communs, comme l’avion de combat européen (dont la maquette a été présentée au Salon du Bourget en juin 2019) et un char franco-allemand qui devrait être opérationnel d’ici 2035.
Mais l’Allemagne a pour habitude de jouer sur plusieurs tableaux (un point commun qu’elle a avec la Turquie d’ailleurs), et elle n’est pas prête à abandonner l’OTAN, ce qui tournerait à l’avantage de la France.
L’OTAN traverse depuis plusieurs années une crise existentielle car il apparaissait de plus en plus que certains États membres agissaient selon leurs intérêts nationaux qui ne peuvent pas toujours converger avec ceux de leurs alliés. Et ce, à commencer par les Etats-Unis qui pilotent l’OTAN et qui s’en servent comme d’un outil stratégique au détriment de leurs alliés. Le comble fut atteint avec les déclarations de l’ancien président américain, Donald Trump, qui suggéra à plusieurs reprises, durant l’année 2018, le retrait des Etats-Unis de l’OTAN.
En réponse à Donald Trump, plusieurs voix de l’Establishment américain se sont élevées, à l’instar de Michèle Flournoy, sous-secrétaire à la Défense (2009-2012) sous Barack Obama, qui a déclaré : « Un retrait de l’Alliance (OTAN), en place depuis 1949, serait un des actes les plus dommageables qu’un président américain pourrait faire contre les intérêts des Etats-Unis. Cela détruirait plus de 70 ans de travail laborieux au sein de multiples administrations, républicaine et démocrate, pour créer peut-être l’alliance la plus puissante et la plus avantageuse de l’histoire. Et ce serait le plus large succès dont pourrait rêver Vladimir Poutine. »
Et James G. Stavridis, ancien commandant suprême allié de l’OTAN, a affirmé qu’un retrait américain de l’Alliance serait « une erreur géopolitique aux proportions épiques. Même discuter de l’idée de quitter l’OTAN — sans parler de le faire réellement — serait le cadeau du siècle pour Poutine. »

LA MILITARISATION DE L’UNION EUROPÉENNE

Il existe une Politique de sécurité et de défense commune (PSDC), dont les objectifs sont définis à l’article 42 du Traité sur l’Union européenne qui stipule qu’elle peut avoir recours à des moyens civils et militaires en dehors de l’Union « afin d’assurer le maintien de la paix, la prévention des conflits et le renforcement de la sécurité internationale conformément aux principes de la charte des Nations unies » et précise que le PSDC poursuit l’objectif de définir progressivement une « politique de défense commune de l’Union… Elle conduira à une défense commune, dès lors que le Conseil européen, statuant à l’unanimité, en aura décidé ainsi ».[…]

Jean TERRIEN.