Rivarol n°3586 du 2/11/2023 (Papier)
Editorial
Plan Darmanin sur l’immigration : la grande manipulation !
SAVEZ-VOUS COMBIEN de textes ont été votés sur l’immigration en France par le Parlement depuis 1980 ? 28. Celui présenté actuellement par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, et annoncé depuis le 27 juillet 2022, est donc le 29e. Oui, vous avez bien lu ! Autrement dit, presque chaque année depuis quatre décennies, les parlementaires ont voté un nouveau texte censé réguler et organiser les flux migratoires. A chaque fois, le locataire de la Place Beauvau roule des mécaniques, donne des coups de menton, se hausse du col, se veut inflexible et intraitable. Avec lui, c’est sûr, les Français seront enfin protégés et la question de l’immigration massive enfin réglée. On nous fait le coup depuis quarante ans. Qui ne se souvient de la plate-forme RPR-UDF de 1986, élaborée en grande partie grâce aux travaux du Club de l’Horloge, et qui entendait rétablir le droit du sang et en finir avec le droit du sol, limiter les naturalisations et le droit d’asile, lutter fermement contre les filières d’immigration clandestine ? Qui a oublié les “terribles” lois Pasqua-Pandraud, les sentences définitives d’un Charles Pasqua qui, en Tartarin, se faisait fort, en tant que ministre de l’Intérieur de Jacques Chirac de 1986 à 1988, de « terroriser les terroristes » (on parlait déjà de terroristes à cette époque dans le débat public, mais ce n’était pas les mêmes !) et d’en finir avec le laxisme en matière migratoire ? Qui ne se souvient des états généraux sur l’immigration du RPR et de l’UDF à Villepinte en 1990 et où les orateurs affirmaient énergiquement à la tribune qu’il fallait mener une politique « d’immigration zéro », c’est-à-dire, si les mots ont un sens, ne plus accueillir un seul nouvel immigré sur le sol national, qu’il soit en situation régulière ou non ? Qui a oublié la fameuse interview de Valéry Giscard d’Estaing dans le Figaro Magazine où l’ancien président de la République expliquait que « la question de l’immigration se déplaçait désormais vers celle de l’invasion » ?
En réalité, toutes ces déclarations n’étaient que des paroles verbales destinées à endormir, à rassurer faussement, à anesthésier l’électeur, à tromper et manipuler les Français qui ne souhaitaient pas être submergés ni remplacés. Car tous les gouvernements sans exception, surtout depuis l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir en 1981 — mais on pourrait remonter plus haut, avec l’instauration du regroupement familial en 1976 et même aux facilités législatives et réglementaires accordées auparavant à l’immigration extra-européenne — n’ont eu de cesse dans les faits de participer activement au phénomène de Grand Remplacement et donc de substitution de population. Ce n’est pas un hasard d’ailleurs que le regroupement familial est entré en vigueur un an seulement après l’adoption de la loi Veil légalisant l’avortement. Le massacre des innocents et l’invasion migratoire sont les deux moyens conjugués et complémentaires d’opérer rapidement, en l’espace de quelques décennies seulement, ce qui est très peu au regard de l’histoire, ce Grand Remplacement. Et les choses n’ont nullement changé depuis. Au contraire elles se sont même aggravées.
AU MOMENT même où le ministre de l’Intérieur s’apprête à présenter et à défendre son projet de loi sur l’immigration qui prévoit de nouvelles régularisations d’immigrés clandestins, notamment pour les métiers dits sous tension où, selon lui, l’on manquerait cruellement de personnels, alors qu’il y a des millions de chômeurs et d’inactifs en France qui pourraient combler ces manques (on se moque vraiment du monde !), le président de la République a annoncé solennellement sur Twitter qu’il va déposer cette semaine, toutes affaires cessantes, un projet de loi au Conseil d’Etat pour inscrire dans la Constitution la « liberté des femmes de recourir à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) » de sorte qu’« en 2024, la liberté des femmes de recourir à l’IVG sera irréversible ». Graver dans le marbre constitutionnel le génocide des enfants à naître — tout en encourageant parallèlement celui des enfants de Gaza tués par les bombardements sionistes au nom du “droit d’Israël à se défendre” c’est-à-dire en réalité à opérer des massacres, des tueries de masse en continu —, voilà les priorités du président Macron qui s’apprête par ailleurs à faire voter par le Parlement une loi dépénalisant l’euthanasie active et le suicide assisté. Les bébés avortés et les vieillards euthanasiés, tel est le programme de la Macronie et même hélas de tous les partis ! Dans quel monde démoniaque nous est-il donné de vivre ! […]
RIVAROL,<jeromebourbon@yahoo.fr>.
Billet hebdomadaire
Youssef HINDI : “L’objectif des sionistes est de construire par le chaos le Grand Israël” (dernière partie de l’entretien)
RIVAROL : Quelle est la position de la Russie sur les événements actuels en Palestine et comment l’interprétez-vous ?
Youssef HINDI : La Russie met en accusation Israël et les États-Unis. Vladimir Poutine a déclaré que les États-Unis, soutiens inconditionnels de l’État juif, sont responsables de la situation catastrophique en Palestine. C’est « le résultat de l’échec de la politique américaine. La politique partiale, conduite sur de nombreuses années, a mené à une impasse de plus en plus profonde ».
Il a ajouté que le siège de Gaza par l’entité sioniste est « inacceptable », et il l’a comparé au siège de Léningrad par l’Allemagne nazie.
En ce moment, Poutine tente de calmer la situation en jouant le rôle de médiateur. Mais la réalité géopolitique est que la guerre en Ukraine et celle qui semble démarrer au Proche-Orient sont les deux fronts d’une même grande guerre opposant les États-Unis, Israël et leurs alliés à la Russie et ses alliés, notamment l’Iran. En cas d’embrasement et d’élargissement du conflit, Moscou ne tiendra pas longtemps en tant que pays neutre.
RIVAROL : L’attaque menée par le Hamas, le 7 octobre dernier, est présentée par les médias du système comme un acte terroriste. Pour vous, quelle est la nature de cet épisode du plus long conflit de l’histoire contemporaine et quel intérêt de le faire passer pour « un pogrom de civils » ?
Y. H. : Je commencerai par répondre en citant l’ambassadeur de Russie à l’ONU, V. Nebenzya, qui a déclaré que « nos collègues occidentaux font de leur mieux pour décrire tout cela comme si l’escalade actuelle était sortie de nulle part. Nous ne pouvons ignorer le fait que l’actuelle flambée de violence s’est produite dans le contexte de la violation systématique par Israël des résolutions du Conseil de sécurité et des Nations Unies. Parmi eux, l’expansion illégale des colonies. Toute tentative d’ignorer ce contexte est une manipulation que nous ne pouvons soutenir. Pendant des années, les États-Unis ont bloqué toute tentative du Conseil de sécurité, tout appel à la modération, arguant qu’il est plus efficace d’aborder ces questions au niveau de la diplomatie régionale. Eh bien, il est désormais clair que cela a échoué. »
Le Hamas a visé des militaires israéliens, et aussi des civils, ce qui peut être qualifié, du point de vue du droit, de crime de guerre. Mais il faut rappeler deux choses. Israël commet des crimes de guerre depuis sa création, et mène une politique de nettoyage ethnique constante depuis l’implantation du Foyer national juif au début des années 1920 ; et deuxièmement, il y a une asymétrie énorme entre la puissance de frappe de l’entité sioniste et celle des groupes armés palestiniens. L’on peut, pour complaire à l’appareil politico-médiatique occidental, condamner toute attaque visant des civils, mais on se doit de rappeler que cette pratique a été normalisée par les Israéliens. De ce point de vue, on peut conclure que le Hamas est dans la violence mimétique.
Sur le terrorisme, je rappelle les propos du Général de Gaulle tenus lors de sa conférence de presse du 27 novembre 1967 : « On sait que la voix de la France n’a pas été entendue, Israël ayant attaqué, s’est emparé en six jours de combat des objectifs qu’il voulait atteindre. Maintenant il organise, sur les territoires qu’il a pris, l’occupation qui ne peut aller sans oppression, répression, expulsion. Et il s’y manifeste contre lui la résistance qu’à son tour il qualifie de terrorisme. » Lorsque l’on chasse un peuple de sa terre et que l’on s’y installe, on s’expose à la violence. Je dirai que cela fait partie du contrat.
Faire passer cette attaque pour un pogrom permet de rappeler aux Occidentaux « les heures les plus sombres de l’histoire » et de justifier ainsi le massacre de masse en cours et l’épuration ethnique que projette Israël depuis longtemps contre les Palestiniens.
RIVAROL : Dès le lendemain de l’attaque, le discours officiel évoquait des massacres horribles et une prise par surprise de l’armée israélienne. Beaucoup évoquent déjà un « 11 septembre » à l’israélienne. Pensez-vous que certains éléments au sein du pouvoir profond sioniste ont laissé faire ce drame pour l’utiliser ou que l’État hébreu est devenu un colosse aux pieds d’argile ?
Y. H. : Le chef des services de renseignement égyptien a déclaré qu’il avait prévenu Netanyahou dix jours avant l’attaque que le Hamas préparait quelque chose d’énorme. On peut effectivement supposer qu’Israël a laissé faire pour se donner le prétexte attendu afin de lancer cette attaque sans précédent et la justifier aux yeux du monde. Arnaud Klarsfeld a parlé d’un « 11-Septembre israélien ». Et visiblement, l’attaque du Hamas n’était pas suffisamment meurtrière pour Tsahal qui a fait circuler une fausse information, à savoir la décapitation de « 40 bébés israéliens par le Hamas ». Ce sont des soldats israéliens qui ont dit « qu’ils pensaient que… », notamment à une journaliste de Sky News qui a déclaré que « nous avons demandé à trois reprises aux Forces de défense israéliennes de confirmer ces chiffres. Elles ne l’ont pas encore fait… Nous n’en avons pas vu la preuve ».
On n’a jamais trouvé les traces de ces bébés décapités. Cela ressemble à de la propagande de guerre qui nous rappelle les couveuses du Koweït, la maternité de Kharkov et le massacre de Boutcha, et bien d’autres média-mensonges, pour reprendre le néologisme de Michel Collon.
Il n’en demeure pas moins que c’est une humiliation pour la “puissante” armée israélienne qui a forgé sa réputation lors des deux guerres de 1967 et de 1973 qui l’opposaient à des armées arabes relativement faibles. La dernière guerre d’Israël qui l’opposait au Hezbollah en 2006 a montré au monde entier la réalité de cette puissance. Tsahal a été vaincu. Et tout porte à croire qu’une attaque au sol à Gaza se soldera par un massacre, car les réservistes israéliens ne sont pas prêts pour une telle confrontation au milieu des ruines.
RIVAROL : Comment définir l’idéologie sioniste actuelle ?
Y. H. : Le sionisme est depuis l’origine un projet religieux, messianique, qui s’est sécularisé au XIXe siècle. J’ai consacré un livre entier à ce sujet : Occident et Islam — Tome 1 : Sources et genèse messianiques du sionisme (Éditions Sigest, 2015). Le sionisme est apparu aux yeux du monde comme un projet politique laïque. Les témoins de la création du Foyer national juif et de l’État d’Israël n’ont pas su voir son essence religieuse et sa dimension proprement eschatologique. L’État d’Israël opère un tournant progressivement religieux après la guerre de 1967 ; et sa nature profonde commença à se faire jour. On peut dire que la guerre de Six Jours, qui fut considérée par nombre de juifs comme un miracle géopolitique, a ramené le sionisme à son arkhè messianique. Et depuis une dizaine d’années, les gouvernements successifs sont ouvertement religieux, orthodoxes et messianistes. L’objectif affiché est la destruction de la Mosquée al-Aqsa, la construction du troisième Temple et l’extension des frontières d’Israël du Nil à l’Euphrate. C’était le projet de départ, et ce avant même la création du Foyer national juif. Théodore Herzl, qui était athée, a écrit en 1904 que les frontières du futur État d’Israël s’étendront « du fleuve d’Égypte à l’Euphrate » . Le Rabbi Fischmann, membre de l’Agence Juive pour la Palestine, a déclaré dans son témoignage au Comité Spécial d’Investigation de l’ONU du 9 juillet 1947 : « La Terre Promise s’étend du fleuve d’Égypte à l’Euphrate. Elle inclut une partie de la Syrie et du Liban. »
RIVAROL : La contre-attaque contre la bande de Gaza risque de devenir une vaste opération de nettoyage ethnique de ce territoire. Quelle est la doctrine actuelle de l’Etat sioniste envers les territoires occupés ? Assistons-nous à une nouvelle étape du « grand remplacement » des Palestiniens par les colons sionistes ?
Y. H. : Comme je l’ai dit, depuis l’implantation du Foyer national juif en Palestine, il y a un siècle, l’objectif est de judaïser le territoire que les sionistes considèrent comme appartenant au peuple juif. Ce territoire inclut le Sinaï égyptien (qui a été occupé et colonisé par Israël de 1967 à 1982), le Liban, une partie de la Syrie […]
Propos recueillis par Monika BERCHVOK.