Rivarol n°3601 du 14/2/2024
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Editorial

Vers la panthéonisation de Robert Badinter (1928-2024), le pourrisseur en chef ?

ELLE N’EN RATE PAS UNE. A l’annonce de la mort de Robert Badinter le vendredi 9 février, Marine Le Pen a cru bon de rédiger un communiqué d’hommage où elle salue « une figure marquante du paysage intellectuel et juridique » et « un homme de convictions » qui, il est vrai, l’avait publiquement adoubée, ainsi que Serge Klarsfeld, lorsqu’elle a voulu se rendre le 5 novembre dernier à Paris à la manifestation contre l’antisémitisme (et qui était en réalité un défilé en faveur de l’entité sioniste et de ses crimes en Palestine occupée). Jordan Bardella, son successeur juvénile à la tête du Rassemblement national, n’émet pas non plus la moindre réserve ou nuance dans son hommage : « ancien ministre de la Justice, homme de lettres, Robert Badinter a défendu toute sa vie ses idéaux, avec constance et éloquence ». C’est à cela aussi qu’on mesure à quel point le FN, devenu RN, a changé car il eût été inimaginable de lire pareille prose de la part du FN canal historique. Badinter a en effet incarné toute sa vie ce que déteste la droite nationale : la complaisance pour le crime et les assassins et l’indifférence en faveur des victimes, fussent-elles mineures (sauf quand ces victimes appartiennent à une certaine communauté très protégée).
L’abolition de la peine capitale qu’il imposa en octobre 1981 aggrava le nombre, l’intensité et la sauvagerie des crimes car si on peut discuter à l’infini du caractère dissuasif de la peine de mort, ce qui est certain, c’est qu’elle interdit la récidive. Or les meurtriers les plus sanguinaires sont généralement de multirécidivistes. On ne parlait guère avant 1981 d’enlèvement, de séquestration, de tortures et de mise à mort d’enfants. Aujourd’hui c’est hélas devenu tristement banal. Nul doute que l’abolition de la peine de mort, comme d’ailleurs la légalisation de l’avortement, ont joué un grand rôle dans cette évolution funeste. Avant de devenir le premier garde des Sceaux de François Mitterrand, de 1981 à 1986, il s’était fait fort, en tant qu’avocat, à la fin des années 1970, de sauver la tête du criminel Patrick Henry qui avait froidement tué un garçonnet de 7 ans, Philippe Bertrand, pour des raisons strictement crapuleuses. Eh bien à son procès aux Assises, Badinter avait réussi à émouvoir les jurés en détournant le débat autour de l’infamie que serait la peine capitale de sorte que Patrick Henry ne fut pas condamné à mort. Alors qu’il n’y avait aucune circonstance atténuante dans le dossier qui pût justifier ou motiver une telle décision. Mais on était déjà dans l’idée folle qu’il faut penser au coupable, qui lui-même est une personne humaine, et qui a le droit à la rédemption. Avec ce genre de considérations, on détruit une société, on ne rend plus la justice, on ne pense plus aux victimes et à leurs familles. C’est dramatique.

TOUTE SA VIE Badinter fut un pourrisseur. Car l’abolition de la peine de mort ne fut nullement compensée par des peines de substitution (qui de toute façon auraient été insuffisantes). Ce qui conduisit mécaniquement à réduire l’échelle des peines, de telle sorte que les crimes et délits étaient systématiquement moins condamnés, ce qui fut une excellente affaire pour les délinquants et criminels de toutes espèces, de sorte que l’insécurité s’accrut et que des crimes de plus en plus horribles, de plus en plus sauvages, se multiplièrent. Le sinistre Badinter est également à l’origine de la suppression de la loi, prise sous Vichy, interdisant des relations homosexuelles avec des mineurs de quinze ans. La suppression de cette loi favorisa également la pédomanie. L’enfance et la jeunesse furent donc sacrifiées par les lubies idéologiques du grandiloquent et fat Badinter dont la suffisance était insupportable. Il fallait l’entendre pontifier, cet homme si content de lui et si dédaigneux du malheur des innocents, des humbles, des sans-grade, lui qui était un grand bourgeois multi-milliardaire depuis son mariage avec la fille et principale actionnaire du fondateur juif de Publicis ! Car lui est toujours resté dans le même cadre communautaire. La diversité, c’est bon pour les autres. Pas pour lui.
Mais c’est peut-être à la tête du Conseil constitutionnel où le nomma en 1986 son ami François Mitterrand que Badinter se montra le plus pervers et le plus efficace dans sa volonté de censurer toutes les lois de droite, toutes les législations déplaisant à son idéologie gauchiste et droitdel’hommiste. Il fit état de manière machiavélique du préambule de la Constitution de 1946 et de sa référence à la déclaration des Droits de l’homme pour retoquer tout ce qui contrariait ses billevesées idéologiques. C’est ainsi que tous les textes voulant réformer, fût-ce timidement, la nationalité, durcir quelque peu les conditions de naturalisation, limiter l’immigration, aider l’école libre furent systématiquement censurés ou totalement défigurés et vidés de leur substance par le Conseil constitutionnel. Et cette détestable attitude, qui confine à la forfaiture et à la haute trahison (car de hauts magistrats avec morgue et outrecuidance font fi pour de pures raisons idéologiques de la volonté du peuple et de ses représentants), commencée sous Badinter, a continué après lui, comme on l’a encore vu récemment avec la censure de 40 % de la loi Darmanin sur l’immigration, notamment tout ce qui durcissait un peu les conditions de naturalisation, le délai pour les étrangers résidant en France pour obtenir des allocations, etc. Les seuls rares aspects positifs de cette loi, au demeurant bien faiblarde, ont été censurés tandis que ses aspects négatifs (les régularisations de clandestins facilitées) ont, eux, été intégralement maintenus. Mais de Badinter à Fabius, il y a comme une continuité !

ON PRÉSENTE Badinter comme un homme universaliste et généreux. Rien n’est plus faux. Il était fondamentalement un tribaliste. Car s’il prétendait être attaché à la liberté d’expression, il fut très en pointe contre l’humoriste Dieudonné contre lequel il appela, le visage haineux et la mâchoire serrée, à une répression fulgurante pour empêcher ses spectacles irrévérencieux et le faire taire. On le présente comme un homme profondément attaché à la justice et à l’équité mais, lors de l’affaire du Sofitel new-yorkais, il prit totalement parti, et avec quel aplomb, pour son ami juif, le milliardaire DSK, ne tenant aucun compte du témoignage d’une simple femme de chambre de couleur et ne manifestant à son égard aucune compassion. Où était à ce moment-là le Badinter ami des pauvres et l’adversaire du racisme ? Badinter était par ailleurs un sectateur de la jurisprudence de Nuremberg qu’il défendit jusqu’à son dernier souffle et, à ce titre, il se montra toujours un adversaire implacable des révisionnistes en général et de Robert Faurisson en particulier. Alors que le Professeur l’avait poursuivi en 2007 car Badinter avait mensongèrement dit que la Justice l’avait traité de « faussaire de l’histoire », le vieillard montra à l’audience tout son fiel et toute sa haine tribale et tripale, mais sans jamais s’aventurer, et pour cause, sur le terrain historique.
Emmanuel Macron rend un hommage solennel ce mercredi 14 février à midi place Vendôme, siège du ministère de la Justice, à Badinter. Alors que les radios, les télévisions et les journaux ont tous encensé ces derniers jours leur grand homme, sans que jamais n’apparaisse la moindre réserve — c’est à cela aussi qu’on mesure à quel point nous vivons aujourd’hui dans un pays occupé et asservi par un Lobby tout-puissant et arrogant —, sa panthéonisation nous semble aller dans la logique des choses. Dans la logique de leur régime. Ce ne serait nullement une surprise. Mais il y a longtemps que l’église initialement dédiée à Sainte Geneviève, patronne de Paris, a été volée et profanée par les révolutionnaires. Depuis ce vol sacrilège, et au fur et à mesure que leur République y dépose « ses grands hommes », elle est chaque jour davantage un dépotoir et une déchetterie. […]

RIVAROL,<jeromebourbon@yahoo.fr>.

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Billet hebdomadaire

La guerre d’octobre 1973

La guerre opposant Israël d’un côté, l’Égypte et la Syrie de l’autre, était inévitable, l’État hébreu occupant, depuis la guerre des Six jours, le Sinaï égyptien et le Golan syrien. Cette guerre aura des répercussions énormes sur le Proche-Orient en général et la Palestine en particulier.

SEPTEMBRE NOIR

La question palestinienne n’est plus une priorité pour les dirigeants arabes — même si elle demeure importante — tout particulièrement depuis la défaite de 1967, mais la résistance palestinienne reste un levier qu’ils peuvent utiliser contre Israël tout en évitant une confrontation directe.
La faiblesse des pays arabes et leur incapacité à obtenir une victoire contre Israël ont radicalisé les organisations de la résistance palestinienne qui ont adopté, en mai 1970, via le Conseil National Palestinien, un programme d’action politique et militaire en vue de la libération complète de la Palestine. La résistance palestinienne s’est donnée le droit de mener la lutte à partir des pays arabes voisins (Égypte, Syrie, Jordanie, Liban). C’est ce qui a poussé le roi Hussein de Jordanie à perpétrer les massacres du « Septembre Noir » en 1970.
Le 12 septembre 1970, un conflit armé oppose l’armée jordanienne aux militants du Fatah. C’est le point d’aboutissement de tensions anciennes, lorsque, dès les années 1960, « les réfugiés palestiniens dans les camps s’organisent pour résister militairement à Israël. Leur nombre atteint 40 000 combattants après la guerre des Six Jours : ils multiplient les opérations en traversant le Jourdain, et en réaction, Tsahal mène des représailles en territoire jordanien. »
Cette situation met en péril la stabilité de la Jordanie et la souveraineté du roi. Yasser Arafat va jusqu’à appeler à son renversement. Le FDLP lance le mot d’ordre « tout le pouvoir à la Résistance ».
Pendant l’été 1970, le roi Hussein échappe à plusieurs attentats. Lors du détournement de trois avions civils à Zarka le 6 septembre, le chef du FPLP, Georges Habache, déclare que « le roi Hussein est un dirigeant réactionnaire, chef d’un État réactionnaire et donc un obstacle ».
C’est alors que le roi de Jordanie déclenche l’opération Septembre noir contre les résistants palestiniens. Son armée, composée majoritairement de Bédouins, libère les passagers des avions détenus dans un hôtel. Le roi proclame la loi martiale le 16 septembre et le lendemain les bombardements des bases palestiniennes et des camps de réfugiés commencent. Selon la Jordanie, ce massacre aurait fait 2 000 morts, 3 000 selon les Palestiniens. L’affrontement s’interrompt le 27 septembre par l’Accord du Caire dont l’initiateur est Nasser. Cet accord, en quatorze points, signé par le roi Hussein, Yasser Arafat (OLP) et d’autres dirigeants arabes, prévoit notamment le départ progressif des combattants palestiniens. Un autre accord est signé le 13 octobre 1970 à Amman, mais l’armée jordanienne poursuit l’élimination de la résistance palestinienne sur son territoire jusqu’en juillet 1971, quand les combattants palestiniens sont expulsés vers le Liban.
Au Liban, les combattants palestiniens bénéficient d’un statut particulier. Par les accords secrets du Caire, signés en novembre 1969 et rendus publics en 1970, l’OLP a obtenu l’autorité sur les camps de réfugiés et l’autorisation d’utiliser le Sud-Liban comme base arrière pour mener des actions en Israël.
Le 28 septembre 1970 survient la mort du président Nasser, qui est remplacé par Anouar al-Sadate, son vieux compagnon.
En novembre 1970, arrive au pouvoir en Syrie Hafez al-Assad qui va mettre un terme à « l’instabilité politique du pays et va faire de la Syrie un acteur majeur de la géopolitique arabe ». La Syrie bénéficie d’une aide financière des pays du Golfe qui lui permettra un développement économique et le renforcement de son armée en vue de la prochaine et inévitable guerre avec Israël.

LA GUERRE D’OCTOBRE 1973 ET LE DOUBLE JEU DE SADATE

Assad et Sadate préparent dans le plus grand secret leur attaque surprise contre Israël pour récupérer le Sinaï et le Golan. Le but de guerre d’Assad est d’obtenir le retrait complet et inconditionnel des Israéliens de « tous les territoires occupés et la restauration des droits des Palestiniens ».
Ils lancent leur offensive le 6 octobre 1973 sur les deux fronts à la surprise des Israéliens qui diront par la suite qu’ils en avaient eu connaissance mais qu’ils ne souhaitaient pas mener une attaque préventive et ainsi apparaître comme agresseurs.
Les Égyptiens traversent le Canal de Suez, détruisent la ligne de défense israélienne (la ligne Bar-Lev) et avancent dans le Sinaï. L’opération égyptienne, baptisée « Badr », est un grand succès. L’état-major égyptien s’attendait à des pertes « de l’ordre de 10 000 tués et 15 000 blessés, le bilan final n’est que de 208 morts ». L’armée syrienne reprend, quant à elle, les hauteurs du Golan et avance vers le lac de Tibériade.
Le 7 octobre, Sadate divulgue à Kissinger, « et donc aux Israéliens, ses intentions ». Dans une lettre adressée secrètement à Kissinger, Sadate affirme que l’Égypte n’a l’intention « ni d’approfondir l’étendue des affrontements ni d’élargir la zone des combats ». Sadate a déjà probablement en tête l’objectif de négocier avec Israël et de se rapprocher des États-Unis. Il y avait un signe avant-coureur de l’ambiguïté de Sadate : alors qu’il préparait une guerre contre Israël, avec des armes soviétiques, il expulse, en juillet 1972, les conseillers militaires soviétiques.
Dans les jours qui suivent, le rapport de force s’équilibre puis bascule en faveur d’Israël — notamment grâce au soutien en armement des États-Unis — qui pénètre en territoire syrien et qui traverse le canal de Suez et encercle la 3e armée égyptienne stationnée à l’Est du canal. Et alors que « la Syrie, profitant du soutien des pays arabes et d’un pont aérien soviétique, réorganise ses forces et prépare une contre-offensive sur le Golan, Sadate déclare, dès le 16 octobre, qu’il accepte un cessez-le-feu si Israël s’engage à se retirer de tous les territoires occupés en 1967. »
Les pays arabes exportateurs de pétrole décident, le 17 octobre, d’imposer un embargo sur la livraison aux pays qui soutiennent Israël, à savoir les États-Unis, les Pays-Bas, le Portugal et l’Afrique du Sud. Mais les quantités livrées ne sont réduites que de 5 %. Le Pacte de Quincy, qui assure la protection de la tribu des Saoud à la tête de leur royaume en échange du pétrole, est toujours en vigueur et le roi Fayçal ne peut se permettre de le remettre en question. […]

Jean TERRIEN.