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Rivarol n°3629 du 25/09/2024 (Papier)

Editorial

Le gouvernement Macron-Barnier : tout changer pour que rien ne change !

DEUX MOIS ET DEMI après le second tour des législatives et deux semaines et demi après la nomination par le président de la République d’un Premier ministre, la France dispose enfin d’un nouveau gouvernement depuis le 21 septembre au soir. Reste à savoir pour combien de temps (et pour quoi faire) puisqu’il ne peut compter que sur une majorité relative à l’Assemblée et qu’il suffirait que la gauche et le Rassemblement national votent en même temps la censure pour qu’il tombe immédiatement. Le Premier ministre prononcera son discours de politique générale au Palais-Bourbon le mardi 1er octobre. On verra à ce moment-là comment les différents groupes politiques se positionneront. Mais s’il devait échapper à la censure, ce qui est fort probable à ce stade, il le devrait uniquement à Marine Le Pen qui semble avoir fait le choix pour l’instant de le laisser gouverner. Les 126 députés RN et leurs 16 alliés ciottistes ne devraient pas en effet voter la motion de censure qui sera déposée par le Nouveau Front populaire.
Sur ce point la gauche n’a donc pas tort d’affirmer que le gouvernement Barnier n’existe et ne peut durer que grâce à la bienveillance voire à la complicité active du RN — preuve, soit dit en passant, que ce parti fait plus que jamais office d’opposition contrôlée, comme en témoignent aussi les dîners parisiens organisés au domicile de Thierry Solère, proche conseiller de Macron, entre Marine Le Pen et Edouard Philippe et entre Jordan Bardella et Sébastien Lecornu —  mais les socialistes, les écologistes, les communistes et les insoumis restent mal placés pour donner des leçons car eux-mêmes, en participant activement au Front républicain lors des législatives, ont assuré mécaniquement la réélection de dizaines de députés macronistes sortants qui, sans ces retraits, auraient été battus, ce qui a permis à la pseudo-majorité présidentielle non seulement de sauver les meubles mais même de continuer à occuper une place prépondérante voire centrale.

ON L’AVAIT déjà vu avec la réélection au Perchoir de la macroniste (et très sioniste) Yaël Braun-Pivet. On le voit, de manière encore plus spectaculaire, avec la formation du nouveau gouvernement majoritairement composé de macronistes alors que les soutiens du chef de l’Etat ont pourtant perdu leur majorité relative à l’Assemblée. Non seulement plusieurs ministres proches du chef de l’Etat conservent leur portefeuille, et non des moindres, comme Sébastien Lecornu à la Défense et Rachida Dati à la Culture, mais sur 39 membres composant le gouvernement Barnier, 17 au moins sont macronistes. 12 en effet sont étiquetés Renaissance (le parti présidentiel), trois appartiennent au MoDem (celui de François Bayrou), deux sont chez Horizons (celui d’Édouard Philippe). Comme le note Le Figaro, « à l’instar des rapports de force à la Chambre basse, un bon tiers du gouvernement reste plus ou moins fidèle à la ligne du président de la République. Signe qu’Emmanuel Macron garde tout de même la main sur son camp, c’est Renaissance qui décroche le plus grand nombre de ministres de plein exercice (sept), de ministres auprès du Premier ministre (trois), et de ministres délégués et de secrétaires d’État (deux). »
Quant aux LR (les Républicains), ils sont eux aussi plutôt bien lotis. Alors qu’ils sont arrivés bons derniers (en quatrième position) aux législatives, avec moins de 10 % des voix et seulement 47 députés sur 577 — et encore beaucoup n’ont sauvé leur siège que par la “grâce” du Front républicain —, l’ancien parti de Chirac et de Sarkozy se taille la part du lion. Les Républicains obtiennent en effet onze postes. Celui d’abord de Premier ministre (Michel Barnier). Trois personnalités LR sont par ailleurs ministres de plein exercice, deux ministres auprès du chef du gouvernement, cinq ministres délégués et secrétaires d’État. Et il faut ajouter à cela la présence de quatre personnalités étiquetées « divers droite ». La Droite dite républicaine hérite surtout du stratégique poste de ministre de l’Intérieur, lequel est confié à l’ex-villiériste et fillonniste Bruno Retailleau, jusque-là président du groupe LR au Sénat. On sait à quel point être à la Place Beauvau peut être un atout politique et médiatique majeur. Nicolas Sarkozy a ainsi bénéficié à plein, sous le second mandat de Jacques Chirac, de son long passage à ce ministère — où il est facile d’utiliser des formules choc destinées à séduire l’opinion, tant le magistère de la parole tient lieu d’action — pour conquérir l’Elysée. Dans une moindre mesure, et pour des succès électoraux plus limités, avant lui, Charles Pasqua et Jean-Pierre Chevènement avaient eux aussi, en leur temps, fait fructifier leur fonction de « premier flic de France ».

LA NOMINATION du Vendéen Retailleau, comme celle de la LR Laurence Garnier — qui devait hériter du ministère de la Famille et qui n’obtient au final qu’un modeste secrétariat d’Etat chargé de la Consommation auprès du ministre de l’Economie —, a fait l’objet d’une levée de boucliers de la part de la gauche, et même au Modem et chez une partie des macronistes. On reproche à ces deux personnalités d’avoir été actives dans la Manif pour tous, d’avoir voté et milité contre le “mariage” homosexuel et d’avoir été hostiles à la constitutionnalisation du « droit à l’avortement ». C’est toujours ainsi que la gauche procède : dès que quelqu’un est considéré comme un tant soit peu conservateur voire réactionnaire, elle crie au scandale par avance, ce qui tue dans l’œuf toute velléité, à supposer d’ailleurs qu’elle existe, de remettre en question de mortifères réformes sociétales. D’ailleurs, sans surprise, le Premier ministre, interrogé le 22 septembre au journal télévisé de 20 heures sur France 2, a clairement indiqué que son gouvernement ne reviendrait en aucune manière sur les « grandes lois de progrès social ou sociétal » (sic !), comme celles sur « l’interruption volontaire de grossesse, le mariage pour tous ou la procréation médicalement assistée (étendue aux lesbiennes) ». Ces législations, a assuré Michel Barnier, seront « intégralement préservées » et, a-t-il cru bon d’ajouter, « je serai un rempart (resic !) pour qu’on préserve l’ensemble de ces droits acquis » en termes « de libertés, de progrès social. Il n’y a aucune ambiguïté. » Difficile d’être plus clair ! S’applique une nouvelle fois de manière saisissante le principe dit du cliquet selon lequel toute réforme sociétale voulue et votée par la gauche n’est jamais remise en question, abrogée, ni même amendée, encadrée ou limitée, par la droite (ou ce qui en tient lieu). De sorte que le mal est toujours plus profond, que le corps social se délite, que les cerveaux et les cœurs sont toujours davantage empoisonnés, les consciences détruites, les âmes assassinées.
Il est également frappant qu’un Retailleau qui, sur le papier, est un des moins mauvais — et un des plus à droite — parmi les dirigeants des Républicains accepte de participer activement à une équipe gouvernementale qui non seulement ne reviendra sur aucune des réformes sociétales criminelles mises en œuvre ces dernières années et décennies mais très probablement aggravera encore la situation, par exemple en dépénalisant bientôt l’euthanasie et le suicide assisté, comme le souhaitent, semble-t-il, une nette majorité de parlementaires acquis à la culture de mort. Quant à la question des flux migratoires, tout laisse à penser que Retailleau ne fera pas davantage à ce poste que ses prédécesseurs qui ont laissé entrer chaque année des centaines de milliers d’immigrés légaux supplémentaires (sans compter les clandestins dont le nombre est par définition inconnu). Le voudrait-il d’ailleurs qu’il ne le pourrait pas, le Conseil d’Etat en amont et le Conseil constitutionnel en aval détricotant minutieusement toutes les mesures de relative ou d’apparente fermeté au nom des droits de l’homme et du préambule de la Constitution. Mais le rôle du ministre de l’Intérieur sous la Vème République n’est pas d’agir, mais de faire semblant. Il est de parler et de rassurer l’électeur moyen. Mieux encore, si possible, de le séduire, de le tromper en lui faisant accroire qu’on cherche réellement à faire sa volonté. Saint Augustin avait bien raison d’écrire et de prédire que les derniers temps seraient ceux de la séduction !

BREF, il n’est rien de bon à attendre de ce nouvel attelage gouvernemental qui apparaît comme un syndic de faillite et qui poursuivra la même détestable politique que ses prédécesseurs. Il n’est d’ailleurs là que pour cela. Afin de sauver un régime, de faire perdurer autant que possible un système qui parvient de moins en moins à masquer sa nocivité. Compte tenu de l’état catastrophique des finances publiques (un déficit supérieur à 5 % du PIB, une dette de plus de 3000 milliards d’euros), il faut s’attendre à une forte augmentation des impôts dans un pays qui détient pourtant le record d’Europe des prélèvements obligatoires dont le montant exorbitant est déjà confiscatoire. Et on ne peut pas compter sur le fade et européiste Michel Barnier pour défendre l’indépendance de notre pays ni par rapport à la finance internationale qui nous écrase et nous accable, ni par rapport à l’Union européenne dont il est un vassal et un obligé, ni par rapport à l’Otan ou à l’entité sioniste qui est pourtant en train de mettre le feu partout au Proche-Orient, de la Palestine au Liban, et ce dans une impunité totale qui fait froid dans le dos et qui annonce des lendemains effrayants. […]

RIVAROL,<jeromebourbon@yahoo.fr>.

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Billet hebdomadaire

Les fenêtres d’Overton de la conquête sioniste

On a peut-être tout vu ces derniers mois en matière d’horreurs perpétrées par le bras armé sioniste. Des hommes, des femmes, des enfants, des bébés, agonisant sous le feu, démembrés avant d’expirer, décapités par un éclat de bombe, écervelés sous l’effet du souffle d’un obus. On a en effet peut-être déjà tout vu, mais le déjà vu continue. Encore et toujours des dizaines et des dizaines de têtes cassées comme des œufs évidés, des enfants écrasés dans les bras ou dans le ventre de leur mère, des pères anéantis, hurlant de douleur devant leur famille entière réduite à l’état de charnier, encore et toujours cette même réalité horrifique que d’aucuns contemplent en mangeant du pop-corn comme s’il s’agissait d’un spectacle cinématographique quand ils ne s’en réjouissent pas ouvertement.
Ces massacres se poursuivent, à Gaza, en Cisjordanie, dans des hôpitaux, dans des écoles, aussi bien dans les quartiers résidentiels qu’au sein même de camps humanitaires frappés sans trembler par « l’armée la plus morale du monde », Tsahal. Sous le prétexte de combattre le Hamas, que Tel-Aviv veut voir disparaître, de jeunes hommes et de jeunes femmes de la soldatesque israélienne saignent à blanc le peuple palestinien dans une indifférence internationale, bien objective derrière quelques mots polis puisqu’elle se traduit par une inaction générale, souvent par un soutien à son égard.
Nous savons donc que le nombre de victimes, la grande proportion des enfants dans leur nombre, l’intensité des souffrances, les atrocités qui s’enchaînent, ne sont pas proportionnels à l’indignation universelle. D’autres facteurs jouent assurément dans le niveau de cette indignation-là.
A l’aune de ce qu’il est légitime d’appeler un génocide en cours du peuple palestinien, peuple en voie d’extermination, isolé de surcroît comme jamais, commis par une puissance surarmée (principalement armée, surarmée, par la grande sœur américaine), les deux vagues d’actions terroristes organisées et parfaitement assumées par les autorités sionistes au Liban (nation officiellement souveraine) qui ont provoqué la mort de plusieurs dizaines de personnes (dont des enfants) deviennent, sous le prisme du gros media omnipotent, une sorte de coup de génie, une opération réussie, une opération chirurgicale, une espèce d’effusion de sang morale. Oui, morale.
« Difficilement critiquable moralement. Peu de dégâts collatéraux ». Moralement, tel est l’adverbe choisi par l’inénarrable Gilles-William Goldnadel pour parler de cette action terroriste au Liban. Ce qu’il perçoit en premier lieu dans la chose serait ainsi son aspect moral.
37 morts (à l’heure où nous écrivons ces lignes), dont des enfants, près de 3000 blessés (souvent touchés aux yeux, à l’abdomen ou à l’entre-jambes) touchés par des bipeurs piégés pour les premières victimes, ou par des talkies-walkies pareillement piégés (avec environ 10 grammes d’un puissant explosif, probablement du RDX) lors de la seconde vague terroriste.
Pour Goldnadel, il est donc moral d’essayer de tuer ou de rendre impotents tous les membres du Hezbollah libanais, les employés y compris faisant leurs courses avec leurs enfants. Si cela est moral à ses yeux, c’est non seulement parce que cela doit l’être (il le postule), mais aussi parce que le Hezbollah est classifié comme une organisation terroriste par différentes entités dont l’Union Européenne. Ainsi, pour notre sioniste national, tout individu possédant au Liban un bipeur ou/et un talkie-walkie, fait partie du Hezbollah et poursuit nécessairement des activités secrètes et maléfiques. Ce sont, pour lui, ils doivent être tous dans son discours, des terroristes ; non pas seulement des terroristes en puissance mais des terroristes en activité qu’il serait de salubrité publique d’éliminer. Une disparition physique nécessaire et méritée, appartenance au Hezbollah oblige.

LA PETITE FENÊTRE D’OVERTON

Après une année de bombardement massif de la bande de Gaza par les forces armées israéliennes, qui se perpétue parfois sur des ruines au cas où il y aurait encore un peu de vie sous les décombres, les explosions d’appareils portatifs individuels au Liban apparaissent comme quelque chose qui serait mieux qu’acceptable en plus d’être ce que les sionistes et autres qualifient de « prouesse technologique ». Comme si la gravité des faits, de cette vaste opération meurtrière, (forcément) préparée de longue date, perpétrée à l’extérieur de l’Israël, était relativisée par le massacre des Gazouis vendu par ses responsables comme de simples “dégâts” collatéraux qu’ils n’ont pu, qu’ils ne pourraient éviter précisément sur le territoire palestinien. Que faudrait-il conclure sur la “moralité” des autorités israéliennes ? Qu’elle serait leur priorité dans l’action, ces autorités faisant toujours tout pour ne cibler que les « méchants terroristes » ?
Cependant, même si le grand public ne percevait pas cette prétendue volonté de ne cibler que les ennemis essentiels de l’Israël, il se sera habitué à la guerre à Gaza, à la guerre en général. Et si l’opinion, lasse, ne réagit plus du tout devant les massacres d’enfants palestiniens, pourquoi le gros media contrôlé et stipendié la réveillerait-il ? Il n’y a aucun intérêt, bien au contraire. Quand les masses se sont accoutumées aux horreurs vécues à Gaza grâce à une couverture médiatique homéopathique (les télés ne montrent pas les milliers de corps en lambeaux des enfants palestiniens victimes des dégâts “collatéraux”), le gros media, le media unique n’a plus qu’à achever l’opinion en lui offrant cet exposé de la prouesse technique de l’entité sioniste. C’est le moment parfait pour le media unique d’ouvrir la fenêtre d’Overton. Et donc d’être focus sur l’opération contre le Hezbollah au Liban. Le media unique avait réussi à faire passer comme “acceptables” (ce qui ne l’étaient pas) les intenses bombardements qui ont pulvérisé Gaza. L’entité sioniste répondait à l’attaque de l’espace du 7 octobre ; elle avait droit à quelques “bavures”…
Maintenant, aux yeux d’une opinion sidérée, le massacre des Libanais possédant un bipeur, un talkie-walkie, devient une chose normale et même de salubrité publique.

ET LA GRANDE FENÊTRE D’OVERTON

Un peu partout dans le monde, et pas seulement en Occident, l’Islam est devenu progressivement dans l’imagerie populaire un vecteur de violence contre lequel la méthode forte était permise.
Nous ne disons pas que tous les événements terroristes liés à l’Islam selon le discours politique et médiatique occidental, et d’ailleurs, sont des attaques sous faux drapeaux. Mais nous pouvons dire, en tant qu’observateur, en tant que simple observateur, qu’un changement de paradigme, de doxa, s’est opéré depuis le 11 septembre 2001.
Auparavant, avant le choc traumatique du 11 septembre (vécu en direct dans le monde entier), il existait une nette distinction entre l’Islam d’une manière générale et le terrorisme, et même l’Islam politique n’était pas associé au terrorisme. Aujourd’hui, tout est beaucoup plus poreux, et le musulman fidèle à sa religion et à ses principes devient de facto, dans l’inconscient collectif, un rétrograde ennemi de toutes les libertés, une brute envers les femmes et leurs mèches de cheveux virevoltant au vent, un antisémite plus ou moins actif, toujours un antisioniste, un ennemi de l’homme blanc, un danger permanent. Une nouvelle ère idéologique est née il y a 23 ans, avec le grand coup du 11-Septembre. A cette date débuta véritablement le fameux choc des civilisations qui avait été théorisé au préalable par Samuel Huntington dans son ouvrage éponyme.
Le media obèse concentra son attention […]

François-Xavier ROCHETTE.