

IL Y A DIX ANS jour pour jour, le 9 avril 2015, Jean-Marie Le Pen accordait une grande interview à RIVAROL avec sa liberté de ton habituelle. Cet entretien, où il n’y avait pourtant rien de répréhensible politiquement et moralement, allait déclencher la fureur de Marine Le Pen qui décida aussitôt de l’exclure du Front national et d’enclencher le processus juridique conduisant au retrait de sa présidence d’honneur. L’année 2015 marqua donc d’une certaine manière la mort politique du Menhir, même si sa disparition physique ne survint que dix ans plus tard. De même, l’année 2025 marque très probablement la mort politique de Marine Le Pen, même si cette dernière refuse encore de l’admettre et d’en tirer les conséquences. Au moment même où elle pensait enfin toucher au but, conquérir la magistrature suprême, après avoir tout renié, tout abandonné, purgé les cadres et militants historiques, tué le père auquel elle devait tout, liquidé les fondamentaux du mouvement national — la défense de la vie et de la famille en votant la constitutionnalisation du droit à l’avortement le 4 mars 2024, il y a un an, et en transformant son parti en lupanar pédérastique, l’abrogation des lois Pleven et Gayssot, la sortie de l’euro et de l’Union européenne, le refus du shoahtisme et de toutes les repentances, la baisse de la pression fiscale, l’attachement à la liberté de l’esprit et à l’être historique de la France, le respect de la morale et de la doctrine chrétiennes, la défense du maréchal Pétain et des combattants de l’Algérie française, etc. —, voici qu’elle est empêchée par la Justice, à la suite d’une sordide affaire d’emplois fictifs et de détournements de fonds publics, digne de l’affaire Urba-Gracco au PS, du dossier des HLM de la Ville de Paris pour le RPR, des affaires Fillon et Sarkozy, de concourir une quatrième fois à l’élection reine de la Ve République.
Alors qu’elle a été intensément promue, médiatiquement et politiquement, depuis le 5 mai 2002, soir du second tour de l’élection présidentielle, et plus encore depuis le 16 janvier 2011, date de son accession à la présidence du Front national, parce que le Système savait qu’elle tuerait l’âme de la droite nationale, abandonnerait tous les pans de son programme, se débarrasserait des cadres et militants nationalistes, mission qu’elle a parfaitement remplie, voici qu’elle est exécutée à son tour avant même d’atteindre le Graal. Les traîtres finissent toujours mal. L’histoire l’atteste : soit on les déteste, soit on les méprise et, après s’en être servis, on les jette. Il y a là somme toute une certaine logique et une forme de justice immanente. Qu’on ne compte pas sur nous en tout cas pour verser des larmes sur le sort actuel de la benjamine de Jean-Marie Le Pen. Nous gardons l’œil sec. Son bilan est en effet lamentable de bout en bout. Et si l’on relit toute la collection de RIVAROL depuis quinze ans et plus, on pourra constater que nous avions prédit, analysé, disséqué toutes ses trahisons, toutes ses reptations et leurs conséquences. Il n’y a pas une ligne, pas un mot à changer. Tout a été dit très à l’avance. Cela nous a valu beaucoup d’inimitié et d’incompréhension. Et pourtant nous disions la vérité. Mais, on le sait, il ne fait pas bon avoir raison trop tôt.
MARINE LE PEN croit — ou feint de croire — qu’avec un procès en appel lors du premier semestre 2026, elle pourra être candidate à la présidentielle de 2027. C’est un leurre. Elle sera selon toute vraisemblance à nouveau condamnée l’année prochaine. Et son pourvoi en cassation sera pareillement rejeté quelques mois plus tard. Invité de France Info il y a quelques jours,, le premier président de la Cour de cassation, Christophe Soulard, a déclaré qu’avec une décision annoncée de la cour d’appel à l’été 2026, la plus haute juridiction du pays dans l’ordre judiciaire pourrait rendre une décision définitive six mois plus tard, en janvier 2027. Ce qui, selon lui, permettrait de purger ce dossier avant la présidentielle du printemps 2027, avant le dépôt des candidatures et la collecte officielle des signatures. Autrement dit, que la cour d’appel assortisse ou non la peine d’inéligibilité de l’exécution provisoire, la Cour de cassation rendra son verdict définitif avant l’échéance présidentielle, ôtant tout espoir à Marine Le Pen de concourir une nouvelle fois. Car il ne faut pas se raconter d’histoire. Au vu du dossier, au vu de la stratégie de la défense qui consiste à nier grossièrement les évidences, au vu des attaques publiques répétées contre les magistrats qui pourraient être indisposés et tentés en appel et en cassation par une forme de crispation corporatiste, elle n’a pas une chance sur cent de s’en sortir. D’ailleurs, avant elle, Fillon et Sarkozy ont été lourdement condamnés. En première instance. En appel. Et la décision a été rendue définitive par la Cour de cassation. Pourquoi en irait-il différemment pour elle ? Les faits sont avérés, le dossier juridiquement étayé. Les juges disposent même d’aveux écrits, de preuves matérielles. Marine Le Pen a fait payer par le contribuable français et européen pendant de longues années l’embauche de sa secrétaire particulière, de son garde du corps, du majordome, de ses petits copains. Julien Odoul a avoué ingénument que, lorsqu’il était assistant parlementaire, il ne connaissait même pas l’eurodéputé pour lequel il travaillait officiellement et qu’il aimerait bien le rencontrer un jour. A l’eurodéputé FN Jean-Luc Schaffhauser qui s’inquiétait légitimement auprès du trésorier national, Wallerand de Saint-Just, de l’attitude irresponsable et juridiquement indéfendable de Marine Le Pen (« ce que Marine nous demande équivaut à signer pour des emplois fictifs. On va se faire allumer »), Saint-Just répondit par courriel ces quelques mots accablants : « Je crois bien que Marine Le Pen est au courant de cela ».
Afin de maximiser les profits et d’utiliser l’entièreté de l’enveloppe (21 000 euros mensuels alloués à chaque eurodéputé pour embaucher des assistants), on déplaçait les vrais-faux assistants parlementaires d’un député à un autre. Sans même qu’ils soient nécessairement au courant. Marine Le Pen décidait de tout. Malgré les millions d’euros de financements publics, de dons, de cotisations et de reversement des élus, le parti étant massivement endetté (à hauteur de plusieurs dizaines de millions d’euros) à cause d’une gestion extrêmement dispendieuse, voire complètement folle du parti, avec embauches pléthoriques, salaires exorbitants, voyages luxueux, fontaines à champagne et petits fours quotidiens à volonté, Marine Le Pen a décidé, avec autorité et détermination, dans une forme de fuite en avant, d’utiliser la totalité des fonds alloués par le Parlement européen (en principe pour l’embauche d’assistants parlementaires) pour continuer à offrir un grand confort de vie à ses proches et collaborateurs, ce qui n’était plus possible avec l’argent du parti, du fait de dettes et de déficits de plus en plus abyssaux. Telle est la réalité des faits. Tout le reste n’est que mensonge et billevesées.
Avec cette affaire, le FN-RN est vraiment devenu un parti comme les autres. La tête basse et les mains sales. Il est loin le temps où Marine Le Pen dénonçait avec indignation à la télévision, en 2004, le visage en colère, au moment de la condamnation d’Alain Juppé dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris, « ces élus qui piquent dans la caisse ». Il est loin le temps où elle se prononçait péremptoirement, en 2013, pour l’inéligibilité à vie des élus condamnés pour corruption, détournement de fonds publics. L’inéligibilité, manifestement c’est bon pour les autres, mais pas pour elle. Un de ses soutiens, le sirupeux Eric Ciotti, vient, pour lui complaire, de déposer, toutes affaires cessantes, une proposition de loi pour supprimer l’exécution provisoire en cas de condamnation à l’inéligibilité. Il faut à tout prix protéger, défendre Marine Le Pen. Et pourquoi au fait ? Que l’on sache, lorsqu’un chef d’entreprise, un médecin, un commerçant est condamné pour détournement de fonds, on n’en fait pas toute une histoire. Suffit-il de se proclamer candidat à une élection pour se permettre de voler et de tricher, de violer une loi votée précisément par les députés, par la représentation nationale ? De qui se moque-t-on ? Et puis si Marine Le Pen n’est pas candidate, cela n’empêchera pas la terre de tourner. Ni ne changera le prix de la baguette. Combien de fois Marine Le Pen a-t-elle dénoncé le laxisme de la justice, s’est-elle prononcée pour la tolérance zéro, a-t-elle exigé des peines plancher, refusé le principe d’aménagement des peines (ce dont elle bénéficiera, avec le bracelet électronique) mais tout à coup, quand il s’agit d’elle, tout cela ne vaut plus. Peut-on être davantage hypocrite et tartufe ? En quoi la délinquance en col blanc serait-elle plus acceptable que les autres formes de délinquance ? En quoi les racailles d’en haut seraient-elles plus estimables, plus excusables que les racailles d’en bas ? Marine Le Pen, c’est l’arroseur arrosé. Tel est pris qui croyait prendre.
LA DROITE NATIONALE a toujours été violemment attaquée, caricaturée, diabolisée. Mais il est un domaine où l’on n’avait pas pu jusque-là la prendre en défaut, c’était celui de l’honnêteté, de la probité, de la droiture. Malgré toutes les attaques et condamnations contre eux, jamais le Maréchal Pétain, jamais les dirigeants fascistes et nationaux-socialistes, jamais Maurras, jamais nos grands ancêtres nationalistes et catholiques n’ont été accusés de corruption ni n’ont été condamnés pour ce motif. C’était notre gloire, notre honneur, notre fierté. Ce qui nous distinguait des autres courants et familles politiques. Avec Marine Le Pen, on innove. Elle aura réussi à salir la droite nationale par son rapport déraisonnable à l’argent et au pouvoir, par cette attitude de grande bourgeoise gâtée consistant à vouloir tout et tout de suite. Quoi qu’il en coûte. La présidence du FN. Quitte pour cela à réaliser des purges massives. Un train de vie de milliardaire. Quitte à multiplier les dettes du parti, puis à détourner des millions d’euros. La présidence de la République. Quitte pour cela à tout renier, à tuer son propre père, à graver dans le marbre constitutionnel le génocide des enfants à naître, à approuver le génocide des Palestiniens, et ce afin d’obtenir le tampon casher d’un lobby puissant et nocif.
Las, tous ses efforts n’auront servi à rien. Elle échoue. Si près du but. A la fois si près et si loin. Car elle était loin encore de pouvoir franchir la barre des 50 % des suffrages exprimés au second tour sur la France entière. Et ce n’est pas son attitude actuelle qui est de nature à élargir son électorat. Mais il y a pire encore. C’est qu’en voulant rester candidate à tout prix jusqu’au bout, jusqu’à l’épuisement de tous les recours, elle va empêcher que la campagne présidentielle se fasse sur des sujets fondamentaux et vitaux pour le pays. Tout va être écrasé par son affaire, son nouveau procès en appel (qui sera également très médiatisé et qui va tourner au supplice chinois pendant encore deux mois), puis son pourvoi en cassation. Il n’y avait déjà pas eu de grands débats sur le fond à cause de l’affaire Fillon en 2017, puis à cause de l’invasion de l’Ukraine en 2022. Et voilà qu’à cause de ce dossier de détournement de fonds publics, il n’y en aura pas davantage en 2027. C’est dramatique.
Si CETTE FEMME avait eu l’étoffe d’un homme d’Etat — mais cela se saurait ! —, elle aurait renoncé à sa candidature en 2027 au vu de la situation. Quitte bien sûr à utiliser tous les recours. Mais en disant d’ores et déjà qu’elle se retirait de la course par souci du bien commun et volonté d’apaisement. Cela aurait immanquablement fait baisser la pression et son affaire n’aurait plus été alors au centre de l’attention politico-médiatique. Alors que là elle va pourrir et encombrer toute la campagne, les deux ans à venir. Alors que la France fait face à des difficultés et des dangers extrêmes, que les sujets vitaux sont légion pour notre nation, de la maîtrise de ses frontières et de son destin en passant par ses choix de civilisation, par exemple sur la question de la famille, de la vie, de l’euthanasie, etc., il est irresponsable de faire croire qu’elle peut encore candidater. Alors que les jeux sont faits.
Et c’est là qu’on mesure une nouvelle fois à quel point cette night-clubbeuse n’est pas à la hauteur des événements. Naguère elle dansait sur sa défaite. Comme si elle avait perdu en finale d’un jeu télévisé, d’une émission de télé-réalité. Aujourd’hui elle veut à tout prix maintenir la fiction de sa candidature présidentielle et oblige tout son parti, tant les dirigeants que les militants (relativement peu nombreux dimanche à l’acclamer : 7000 tout au plus dans une place Vauban très clairsemée) à la suivre près de deux ans encore dans ce déni du réel. Quelle folie ! Et dire qu’il est tant d’organes et de publicistes dans notre mouvance pour donner corps à cette fable, pour répéter sans réflexion et hauteur de vue ces éléments de langage. Pour soutenir Marine Le Pen dans cette affaire, on en vient même à défendre l’affreux Sarkozy qui a été condamné en justice et qui est sous bracelet. Alors qu’on lui doit le traité de Lisbonne, qui faisait fi du rejet par référendum de la Constitution européenne, l’assassinat de Kadhafi qui a conduit à des millions d’immigrés supplémentaires en Europe du fait de l’effondrement de la Libye, l’aggravation du Pacs et la réintégration de notre pays dans le commandement intégré de l’Otan. A l’approche de Pâques, il serait temps enfin de voir la vérité en face. Et de renoncer aux mensonges et aux illusions qui font tant de mal.
RIVAROL,<jeromebourbon@yahoo.fr>.
C’est un tremblement de terre, un séisme, un tsunami, ou plutôt le ressac d’un tsunami. D’aucuns ont pu croire, avant le 2 avril, d’une manière rationnelle, que Donald Trump n’allait pas déclencher le feu nucléaire en matière de droits de douane et allait être davantage subtil, prudent, dans cette nouvelle phase de protectionnisme qu’il avait annoncée depuis plusieurs semaines, et qui avait commencé du reste avec la taxation de l’aluminium et de l’acier européen (une taxe de 25 % décrétée le 26 mars et effective depuis le 2 avril). Las, cette première “punition” n’aura été qu’un léger apéritif à l’aune du coup de massue que les Etats-Unis ont infligé à de nombreux pays, pour ne pas dire au monde entier.
Il existe une taxe plancher de 10 % (sauf pour le Canada — hormis, faut-il encore préciser, pour l’aluminium, l’acier et les automobiles fabriqués dans le pays — et le Mexique — hormis là encore pour les métaux —, c’est-à-dire que même les meilleurs amis de l’Amérique comme le Royaume-Uni et Israël voient leurs marchandises taxées de 10 % (au lieu de 2,5 %).
Mais il est vrai que l’addition pour ces derniers paraît légère en comparaison de celle que vont “payer” (à partir du 9 avril) les autres nations. Un véritable coup de pied dans la fourmilière dont on n’imagine pas encore toutes les conséquences.
LA CHINE DANS L’OBLIGATION DE SE RÉINVENTER
La zone la plus touchée est l’Asie du sud-est : 24 % de droits de douane sur les marchandises en provenance du Japon, 25 % de taxe contre les produits importés de Corée du sud aux Etats-Unis, 26 % pour ceux d’Inde, 46 % de taxes sur les produits du Vietnam (le pays — où un grand nombre d’entreprises américaines sont installées — dont le légendaire Nike — paie son dynamisme économique et son excédent commercial croissant avec les Etats-Unis), et 34 % de nouvelles taxes sur les importations chinoises qui s’ajoutent aux 20 % de droits de douane additionnels déjà mis en place par l’administration Trump ! Ainsi, les produits chinois seront en réalité taxés à hauteur de 60 % .
Selon le grand assureur pour entreprise Allianz Trade, le tiers des exportations chinoises aux Etats-Unis pourrait disparaître, soit 160 milliards de dollars (146 milliards d’euros). Le textile, l’électronique ou encore l’électroménager seront les secteurs les plus touchés.
L’atelier du monde et ses annexes littéralement matraqués par l’Oncle Sam après des décennies de production au service du consommateur et des entrepreneurs américains qui ont délocalisé ou fabriqué d’emblée leurs produits en Asie et particulièrement en Chine. Certes, la Chine a immédiatement répliqué en taxant à la même hauteur les importations américaines dans le pays. Néanmoins, la Chine ne pourra s’en tirer sans réussir, enfin, à faire bondir la consommation intérieure. Cela dit, Pékin avait certainement anticipé l’édification de cette muraille douanière, puisqu’il avait annoncé au tout début du mois de mars un plan de relance de 167 milliards d’euros pour 2025, soit 39 milliards de plus que le plan de 2024.
L’EUROPE ENTRE LE MARTEAU ET L’ENCLUME
L’Europe, celle de l’Union européenne, est également durement frappée par le durcissement du protectionnisme américain. Avec 20 % de droits de douane sur quasiment toutes les importations européennes, l’économie européenne va faire face, à première vue, à une catastrophe. D’autant plus que le Vieux Continent souffre déjà d’une activité atone. L’Allemagne, considérée à juste titre comme la locomotive économique de l’Europe, est en récession depuis plus d’un an. Or, c’est elle qui va subir de plein fouet ces nouveaux droits de douane américains qui n’ont jamais été aussi considérables depuis juin 1930 et l’adoption du Smoot-Hawley Tariff Act. La sanction est en effet terrible pour Berlin parce que, actuellement, 10,5 % des exportations allemandes débarquent aux Etats-Unis (des exportations qui correspondent à 3,9 % du PIB germanique alors que les exportations françaises outre-Atlantique correspondent à seulement 1,8 % de notre PIB), mais aussi parce que ces exportations allemandes sont constituées en majorité de produits surtaxés par Washington (notamment les voitures dont le prix est majoré de 25 %). Ainsi, les Allemands vont être en quelque sorte doublement sanctionnés par la décision américaine (signée par Donald Trump). Et cela au pire moment pour eux, mais aussi, en définitive, pour tous les Européens qui sont tous, dans une certaine mesure, et pour plusieurs raisons, dépendants de l’économie allemande. C’est le cas du Benelux, de la Pologne, de l’Italie (où les sous-traitants pour l’industrie automobile allemande sont très nombreux), de la Suisse et surtout de la France qui a pour premier partenaire économique l’Allemagne, et de loin, devant la Belgique et l’Italie.
L’Allemagne, elle, a pour principaux partenaires économiques les Etats-Unis (où elle exporte massivement) et la Chine pour ses importations. Avec la nouvelle règle du jeu imposée par Trump, ses exportations vont diminuer alors que ses importations chinoises risquent d’augmenter. Les entreprises chinoises, qui ont misé beaucoup sur les exportations, et qui possèdent beaucoup de stocks, vont essayer de compenser leurs pertes américaines en inondant le marché européen de leurs marchandises à prix cassé. Une concurrence qui affaiblira davantage le tissu économique européen. Il ne restera alors qu’une solution pour l’Union européenne. Celle de taxer à son tour d’une manière significative les importations chinoises.
Néanmoins, si l’administration américaine ne recule pas, ni les Etats-Unis, ni l’Asie, ni l’Europe ne pourront s’en tirer sans l’instauration d’une nouvelle politique économique, sans une véritable réindustrialisation de l’Occident, et sans une nouvelle consommation chinoise, un boom de la consommation chinoise. N’est-ce pas, en réalité, ce que souhaitent l’oligarchie mondiale, la haute banque et ses élites pour sortir l’économie mondiale d’une atonie séculaire et lui éviter un krach incontrôlé et incontrôlable ?
Ne peut-on pas penser que les outrances de Donald Trump, au nom de l’America First, son isolationnisme revendiqué, ce protectionnisme brutal après l’éloignement américain du théâtre russo-ukrainien, soutiennent un même projet ? Convaincre les forces vives de l’économie, les entrepreneurs et autres grands acteurs économiques, d’accepter un changement de paradigme, soit une politique d’endettement massif pour des investissements massifs.
DÉTRUIRE POUR CONSTRUIRE
La menace russe avait déjà convaincu la droite allemande que le pays ne pouvait plus se passer d’un coûteux réarmement (et donc du retour à l’endettement). La guerre commerciale de Trump, si elle se maintient (mais il semble bien qu’il ne s’agit pas d’un poisson d’avril), devrait rallier les derniers réfractaires à ce qu’il faut bel et bien appeler l’économie de guerre, une économie davantage planifiée pour fabriquer des armes mais aussi des marchandises que l’Europe ne produisait plus ou qu’elle n’a tout simplement jamais produites.
Depuis la première révolution industrielle, l’économie de guerre apparaît toujours quand le libre-échange ne porte plus ses fruits, quand les taux de profit deviennent insuffisants pour alimenter le secteur productif. Elle précède souvent une guerre qui remet au travail les salariés tout en suçant leur épargne. La guerre est la grande opération honteuse de l’économie-monde mais elle lui est consubstantielle. […]
François-Xavier ROCHETTE.